Regard sur des expressions qu’on entend et qu’on utilise fréquemment sans nécessairement savoir d’où elles sortent.
Battre son plein
Cette expression qui signifie « atteindre
son moment le plus intense » tire son origine du 19e siècle. Au sens propre, elle était liée à la
marée qui, lorsqu’elle avait atteint son point le plus élevé, restait stable un
moment avant de recommencer à descendre.
Au sens figuré, en raison de l’utilisation du verbe battre, certains ont donné à son
plein la signification de sonorité pleine ou forte. En fait, il ne s’agit pas
de l’adjectif mais bien du substantif plein,
soit le niveau le plus haut, comme dans l’expression le « plein
d’essence ».
Ainsi, quand on dit que la campagne
électorale bat son plein, ce n’est pas qu’elle est bruyante (sauf lorsqu’on
l’accompagne à la casserole) mais bien qu’elle est à son plus haut niveau
d’intensité.
D’arrache-pied
Travailler
d’arrache-pied, c’est fournir un effort intense et soutenu. Cette expression
remonterait à 1515 et aurait changé trois fois de signification depuis son
apparition.
À l’époque, elle
signifiait tout de suite et
s’explique par le fait que la personne qui agit immédiatement s’arrache de son
immobilité et arrache donc littéralement ses pieds du sol.
Plus tard, chez
Rabelais (l’auteur de Pantagruel et Gargantua),
elle a signifié sans arrêt ou sans relâche.
C’est à la fin du 18e siècle qu’elle prend le sens qu’on lui connaît
aujourd’hui.
Battre à plate couture
L’expression signifie vaincre ou battre
complètement et de manière définitive. Elle existe depuis le 15e
siècle mais on disait alors « rompre à plate couture ». À l’époque,
les étoffes étaient épaisses et raides. Les coutures et ourlets ajoutaient donc
une épaisseur et une raideur supplémentaires. Les tailleurs réussissaient à
aplatir et à assouplir les épaisses coutures soit en les cousant une seconde
fois, soit en les écrasant avec un gros fer à repasser, ou encore en les
frappant vigoureusement à l’aide d’une latte. Cette opération consistait à
« rabattre les coutures ».
Cette dernière opération a donné lieu à une
transformation de l’expression au 16e siècle alors qu’on disait
« rabattre la couture à quelqu’un » qui signifiait le frapper
violemment. Selon le linguiste et
lexicographe Alain Rey (Le Petit Robert), « rompre » signifiait au
figuré « abattre, démolir, enfoncer (une armée) » et
« plat » provenait du verbe « aplatir » au sens de « vaincre
totalement, écraser ». Au fil du
temps, rabattre et est devenu battre. C’est l’amalgame de ces significations,
auxquelles s’est ajoutée l’opération du tailleur, qui a donné naissance à la
locution plus moderne qu’on utilise aujourd’hui.
Prendre la clé des champs
Tout le monde sait ce que le prisonnier fait
quand il prend la clé des champs. Il s’évade, s’enfuit, se sauve, recouvre sa
liberté. Cette expression date du Moyen-Âge.
Les « champs » signifiaient alors les grands espaces ouverts et
représentaient l’indépendance, la liberté, la fuite hors de la cité. La clé
des champs est en fait l’orthographe erronée de l’expression la claie des champs. Une claie est un
treillage qui servait de clôture ou de barrière entourant les parcs à bestiaux
ou les propriétés.