Un soir de la semaine dernière, j’écoutais
distraitement la description d’un match sportif à la radio quand un des
commentateurs s’est mis à expliquer que si, d’ici la fin de la partie, aucune
des deux équipes n’avait compté de points, la partie allait être nulle. Merci
pour l’explication ! Et à cette perspicacité hors du commun, il a tout de
même ajouté « tout le monde sait ça, c’est une vérité de la police ».
Oui, oui, POLICE. Ce qui a bien fait rire son collègue animateur.
Je ne m’intéresse pas ici au caractère véridique ou
non de ce que les membres des services chargés du maintien de l’ordre avancent, mais
je m’interroge plutôt sur cette dérive – bien québécoise j’en ai peur – de l’expression
vérité de La Palice. Comme je cherche et ne trouve pas d’explication, j’en
déduis simplement qu’un jour quelqu’un a voulu répéter l’expression comme il
avait cru l’entendre… en remplaçant Palice
par police. Si vous avez une
meilleure explication à m’offrir, n’hésitez pas ! Je suis acheteuse.
Alors d’où vient cette vérité de La Palice ?
Cette expression réfère à Jacques II de Chabannes,
dit Jacques de La Palice (ou de La Palisse), né en 1470 à Lapalisse dans
l’ancienne province du duché de Bourbon, au centre de la France. De noble sang,
il était le marquis de La Palice. Il devint, en 1515, maréchal de France. Militaire
accompli, il servit sous trois rois de France et se démarqua dans les guerres
d’Italie, dont celle de Pavie, en Lombardie, où il trouva la mort en 1525.
Afin qu’il soit inhumé dans son pays natal, son
corps fut rapatrié en France. Ses soldats, pour souligner sa bravoure et sa
vertu, lui dédièrent une chanson dont la fin disait : « un quart d’heure avant sa mort, il faisait
encore envie ».
Comme aucune trace écrite de cette chanson n’existe,
la transmission orale a fait en sorte que les vers finaux ont été transformés
en « un quart d’heure avant sa mort,
il était encore en vie ». C’est
ainsi que le marquis de La Palice passa à la postérité et que fut créée la
toute première lapalissade, c’est-à-dire, une affirmation d’une telle
évidence qu’elle en devient risible.
Un peu plus tard, au 18e siècle, une deuxième
chanson, cette fois-ci écrite par Bernard de La Monnoye, parodiait les grands
mérites et vertus du seigneur de La Palice. Tous empreints d’ironie, les
51couplets de la chanson se terminaient par des affirmations si évidentes qu’elles frôlaient le ridicule.
Parmi celles-ci, on cite parfois, pour faire rire la
galerie : « Il mourut le
vendredi / Le dernier jour de son âge / S’il fût mort le samedi / Il eut vécu
davantage ».
Lapalissades,
truismes et autres tautologies
La lapalissade, également appelée vérité de La Palice, est donc une
affirmation ridicule qui énonce une évidence perceptible immédiatement et
entendue de tous. C’est une des raisons pour lesquelles les gens, et souvent
les humoristes, l’utilisent pour faire rire autour
d’eux. Une lapalissade est encore plus drôle quand une personne l’utilise
inopinément, sans s’en rendre compte.
Alors quand Woody Allen
dit « L’éternité, c’est long…
surtout vers la fin », on n’est pas mal en terrain lapalissadais...
tout comme l’est l'expression « ce qui est intolérable ne sera pas toléré »
ou encore, comme l’affirmait Coluche, « Ni pour, ni contre, bien au contraire ... Quoique ! ».
La lapalissade est très proche cousine
du truisme. Celui-ci est une vérité indiscutable
qu’il est superflu de vouloir démontrer et qu'il ne vaut donc pas la peine
d’énoncer.
À titre d’exemple, les expressions :
« Le vainqueur a remporté la victoire. »
et
« Le jour de sa mort a été le dernier jour de sa vie. »
sont des
truismes.
Dans le cas du truisme, l’évidence
est flagrante mais on ne cherche pas nécessairement à ironiser. On retrouve
certaines de ces perles dans les lettres de prestataires adressées à différents
ministères, qui circulent dans Internet, comme :
« On l’a trouvé mort dans un état grave. »
Pour sa part, la tautologie désigne une affirmation qui est toujours vraie mais qui
n’est pas nécessairement perceptible et entendue de tous sur-le-champ. Elle n’a
pas non plus la connotation péjorative qu’on associe à une lapalissade. Il s’agit souvent de la répétition inutile, qu’elle
soit volontaire ou non, d’une même idée dans différents termes.
Ainsi, la phrase : « 100% des gagnants de la loterie avaient
acheté un billet » est une tautologie. La tautologie, en raison de sa
répétition, est aussi appelée pléonasme.
Voici d’autres exemples, qu’on entend souvent :
« C'est
la vérité vraie ! »
« Quand
on voit ce qu'on voit, on a
raison de penser ce qu'on pense. »
« C’est
sûr et certain ! »
« Une
promesse est une promesse ! »
« Un
sou est un sou ! »
« Je
me présente face à vous en personne. »
Me revoilà donc après une longue pause estivale.
J'aime bien lire vos propositions de sujets à traiter.
Continuez de me les faire parvenir!