mercredi 25 septembre 2013

Bonjour La Palice!


Un soir de la semaine dernière, j’écoutais distraitement la description d’un match sportif à la radio quand un des commentateurs s’est mis à expliquer que si, d’ici la fin de la partie, aucune des deux équipes n’avait compté de points, la partie allait être nulle. Merci pour l’explication ! Et à cette perspicacité hors du commun, il a tout de même ajouté « tout le monde sait ça, c’est une vérité de la police ». Oui, oui, POLICE. Ce qui a bien fait rire son collègue animateur.

Je ne m’intéresse pas ici au caractère véridique ou non de ce que les membres des services chargés du maintien de l’ordre avancent, mais je m’interroge plutôt sur cette dérive – bien québécoise j’en ai peur – de l’expression vérité de La Palice. Comme je cherche et ne trouve pas d’explication, j’en déduis simplement qu’un jour quelqu’un a voulu répéter l’expression comme il avait cru l’entendre… en remplaçant Palice par police. Si vous avez une meilleure explication à m’offrir, n’hésitez pas ! Je suis acheteuse.

Alors d’où vient cette vérité de La Palice ?

Cette expression réfère à Jacques II de Chabannes, dit Jacques de La Palice (ou de La Palisse), né en 1470 à Lapalisse dans l’ancienne province du duché de Bourbon, au centre de la France. De noble sang, il était le marquis de La Palice. Il devint, en 1515, maréchal de France. Militaire accompli, il servit sous trois rois de France et se démarqua dans les guerres d’Italie, dont celle de Pavie, en Lombardie, où il trouva la mort en 1525.

Afin qu’il soit inhumé dans son pays natal, son corps fut rapatrié en France. Ses soldats, pour souligner sa bravoure et sa vertu, lui dédièrent une chanson dont la fin disait : « un quart d’heure avant sa mort, il faisait encore envie ». 
Comme aucune trace écrite de cette chanson n’existe, la transmission orale a fait en sorte que les vers finaux ont été transformés en « un quart d’heure avant sa mort, il était encore en vie ».  C’est ainsi que le marquis de La Palice passa à la postérité et que fut créée la toute première lapalissade, c’est-à-dire, une affirmation d’une telle évidence qu’elle en devient risible.

Un peu plus tard, au 18e siècle, une deuxième chanson, cette fois-ci écrite par Bernard de La Monnoye, parodiait les grands mérites et vertus du seigneur de La Palice. Tous empreints d’ironie, les 51couplets de la chanson se terminaient par des affirmations si évidentes qu’elles frôlaient le ridicule.
Parmi celles-ci, on cite parfois, pour faire rire la galerie : « Il mourut le vendredi / Le dernier jour de son âge / S’il fût mort le samedi / Il eut vécu davantage ».

Lapalissades, truismes et autres tautologies

La lapalissade, également appelée vérité de La Palice, est donc une affirmation ridicule qui énonce une évidence perceptible immédiatement et entendue de tous. C’est une des raisons pour lesquelles les gens, et souvent les humoristes, l’utilisent pour faire rire autour d’eux. Une lapalissade est encore plus drôle quand une personne l’utilise inopinément, sans s’en rendre compte.

Alors quand Woody Allen dit « L’éternité, c’est long… surtout vers la fin », on n’est pas mal en terrain lapalissadais...
tout comme l’est l'expression « ce qui est intolérable ne sera pas toléré » ou encore, comme l’affirmait Coluche, « Ni pour, ni contre, bien au contraire ... Quoique ! ».


La lapalissade est très proche cousine du truisme. Celui-ci est une vérité indiscutable qu’il est superflu de vouloir démontrer et qu'il ne vaut donc pas la peine d’énoncer. 
À titre d’exemple, les expressions :
« Le vainqueur a remporté la victoire. »
et
« Le jour de sa mort a été le dernier jour de sa vie. » 
sont des truismes.
Dans le cas du truisme, l’évidence est flagrante mais on ne cherche pas nécessairement à ironiser. On retrouve certaines de ces perles dans les lettres de prestataires adressées à différents ministères, qui circulent dans Internet, comme :
« On l’a trouvé mort dans un état grave. »

Pour sa part, la tautologie désigne une affirmation qui est toujours vraie mais qui n’est pas nécessairement perceptible et entendue de tous sur-le-champ. Elle n’a pas non plus la connotation péjorative qu’on associe à une lapalissade. Il s’agit souvent de la répétition inutile, qu’elle soit volontaire ou non, d’une même idée dans différents termes.

Ainsi, la phrase : « 100% des gagnants de la loterie avaient acheté un billet » est une tautologie. La tautologie, en raison de sa répétition, est aussi appelée pléonasme. Voici d’autres exemples, qu’on entend souvent :
« Je l’ai vu, de mes yeux vu. »
« C'est la vérité vraie ! »
« Quand on voit ce qu'on voit, on a raison de penser ce qu'on pense. »
« C’est sûr et certain ! »
« Une promesse est une promesse ! »
« Un sou est un sou ! »
« Je me présente face à vous en personne. » 

Me revoilà donc après une longue pause estivale. 
J'aime bien lire vos propositions de sujets à traiter. 
Continuez de me les faire parvenir!